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Lichens chevelus, Nénuphars géants, Aristoloches et autres histoires végétales

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Une interview dans le Soir du 30/05/2011

Sandrine de Borman, plasticienne et collaboratrice de la bibliothèque communale Hergé, y égrène les expositions collectives « Légendes de Porcelaines », « Légendes du Sac plastique », « Habits-Habiter ». Toujours en question autour des liens que nous entretenons avec objets naturels et artefacts, mais aussi avec notre quartier, nos paysages, nos entours, elle s’est plongée durant quatre saisons comme artiste en résidence dans un univers végétal exceptionnel à dix minutes de Bruxelles : le Jardin botanique national de Belgique à Meise.
Elle a écouté les histoires que lui contaient les végétaux, mais aussi rencontré les spécialistes de la plante que sont scientifiques, jardiniers, techniciens d’herbier, dessinateurs botaniques, bibliothécaires spécialisés…
Elle a conçu une exposition « Détours végétaux » qui peut se découvrir au Jardin botanique jusqu’au 2 octobre, tous les jours de 9h à 18h30.

Vous y êtes bienvenus à des visites guidées les 9 juillet à 13h et 4 septembre à 15h (gratuit avec l’entrée du Jardin) ; vous êtes aussi invités à participer à un atelier de découverte de la technique de la pulpe de papier le 26 juin de 10 à 17h (50€). Inscription obligatoire pour visites et atelier : 02 260 09 70

Cette exposition-ci à la bibliothèque Hergé présente certains prolongements rhizomiques livresques d’étonnements autour de cinq végétaux.

Cartothèque du pays des Nymphes – ou la serre vue du ciel
Découverts dans la serre des nénuphars géants au jardin botanique, ces nymphéas d’Amazonie, d’Australie ou d’Asie, véritables napperons de dentelles végétales, sont aussi des cartes géographiques passionnantes. Cela a inspiré à Sandrine une cartothèque à partir d’empreintes de ces végétaux sur des draps.


Filles de Zeus et du Ciel, les nymphes grecques sont de belles jeunes filles personnifiant les activités créatives et productives de la Nature qui se retrouvaient souvent dans de beaux draps, amoureuses de dieux et de jeunes gens. Elles peuplent sources et rivières, bois et bocages, vallées et montagnes. Ces lieux sont donc cartographiés ici, lieux où pérégriner, se perdre et se noyer dans des méandres aquatiques et terriennes, à leur suite.

L’étrange temps des Lichens.

Les lichens sont des drôles d’êtres vivants, pas tout à fait végétaux, qui vivent hors de notre temporalité. Ils s’étendent comme la rouille mais avec lenteur : un à deux millimètres par an. Ils sont reviviscents : ils peuvent rester des années sans eau mais un peu d’humidité suffit à leur rendre leur jeunesse ! Ils portent des noms étranges : lichens crustacés, lépreux, fruticuleux qui sont chevelus… Sandrine a créé un herbier de lichens et un carnet suite à la rencontre au Jardin d’un lichénologue passionné, Damien Ertz.

Petit carnet pour que ma sœur regarde autrement les prêles

Il y a au Jardin botanique des prêles géantes de 4 mètres de haut, dans la très belle serre de l’évolution car cette plante est très primitive. Un carnet dédié à la sœur de l’artiste, qui se bat désespérément contre les prêles dans son jardin… rend compte de quelques aspects époustouflants de cette plante si aérienne.

Suaires de rêves botaniques

Le travail sur des « Chus végétaux » glanés sur les chemins du Jardin durant un an a inspiré ce livre-tissus. En effet, dans son travail avec la pulpe de papier, Sandrine utilise des tissus pour presser les végétaux dans la pulpe… et voilà que certains de ces tissus pressés offre de surcroît une empreinte intéressante.
Le suaire est ce qui enveloppe quelque chose à la façon d’un linceul ; ces éléments végétaux laissés pour morts au sol ont imprégné les draps de leurs sueurs végétales, pigments, sève…
Comme les déambulations dans un entour végétal nous étoffe et imprègne nos rêves, comme les plis dans l’oreiller marque notre visage au réveil…
Ces quatre oreillers avec chacun quatre suaires, sont un carnet –qui vient étymologiquement de quaterni, par quatre- des rêves issus des déambulations durant quatre saisons au Jardin.

Aristoloche, Ombres et Impressions

Aristoloche, ce mot résonne comme une injure du capitaine Haddock tant il est burlesque ; l’arrogant Aristo- et la chuintante chute de –loche illustrent déjà les paradoxes de cet extraordinaire végétal. Son étymologie réfère au début de la vie car il fut un remède depuis les grecs pour favoriser (aristo-le meilleur) l’accouchement (lochein-accoucher) ; mais sa botanique renvoie à la mort puisqu’il est appelé plante-cadavre. En effet sa somptueuse parure pourpre qui évoque le velours et la dentelle n’est rien d’autre qu’un leurre de viande avariée pour les insectes pollinisateurs qui sont gardés prisonniers une nuit dans sa pipe. Vie et mort, parure et pourriture, préciosité et invasion, poison et remède… Sandrine a été envoûtée par ce végétal jusqu’à en avoir la peau couverte de boutons, à en faire compulsivement des recherches sur internet et des impressions sur papier, et à créer un livre qui joint tactile, histoire(s), botanique et art.

(texte de S. d. B.)



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