Club de lecture – Lundi 10 juin 2024 de 14h à 15h30
Club de lecture
Lundi 10 juin de 14h à 15h30
À l’initiative de l’une de nos lectrices, un club de lecture s’est formé à la bibliothèque. Il se réunit tous les mois, pour échanger pistes, idées de titres, coups de cœur, lectures d’extraits…
Compte-rendu du 13 mai 2024
Le Tibet profané / Barbara Demick
Le Tibet fut un grand pays indépendant, mais envahi par la Chine, qui y mène une politique de soumission, de destruction de la culture, du patrimoine et de la population depuis les années cinquante. Barbara Demick est une journaliste américaine, correspondante du Los Angeles Times, qui vécut longtemps en Chine et se rendit plusieurs fois au Tibet, à Ngaba, ville actuellement englobée dans la province chinoise du Sichuan. Si elle fait un résumé de l’histoire de la Chine depuis Mao, son projet est original, en ce sens qu’elle concentre son travail sur la population de Ngaba, suivant plusieurs personnes ou familles, qu’elle voit évoluer au cours des différents séjours qu’elle effectue sur place. Cela donne à son enquête un aspect plus personnel, presque romanesque, et très poignant dans la mesure où la tragédie prend un visage humain. Par exemple, l’enquête commence au palais du roi de Ngaba et suit pendant des années le sort de la petite princesse, qui aura doublement à souffrir de son appartenance au peuple tibétain et de ses origines nobles. Et lorsqu’elle évoque le désespoir et la révolte qui poussent les Tibétains à s’immoler par le feu, il s’agit parfois de personnes rencontrées précédemment. Le livre est aussi structuré en chapitres qui se suivent dans un ordre chronologique, en fonction des fluctuations du pouvoir chinois. Le dernier chapitre porte un titre qui résume bien le sort actuel des Tibétains : « tout sauf la liberté », dans lequel elle explique comment les Chinois anéantissent la culture tibétaine, par exemple en remplaçant l’enseignement en tibétain par des pensionnats en mandarin, où les enfants sont envoyés très jeunes, en les coupant de leurs racines familiales. Et de mentionner que le sort des Ouïghours est encore plus tragique. Le livre est solidement documenté, avec références, glossaire, cartes et documents photographiques. Conclusion : lecture salutaire où, actuellement, beaucoup de gens en Europe font les yeux doux à la Chine. (présenté par Thérèse)
Brèves de solitude / Sylvie Germain
Petit livre de 178 pages superbement écrit et très dense. La toile de fond de l’histoire : le premier confinement. Pendant la première partie on se trouve dans un petit square de Paris les habitants du quartier s’y croisent, chaque chapitre est intitulé du nom d’une de ces personnes, un seul être ne sera pas nommé : un réfugié noir, sale, affamé, effrayé, ne sachant plus qui il est, dont la vue suscite des réactions variées, depuis le gamin qui lui tire la langue jusqu’à la dame qui lui donne toute la nourriture qu’elle vient d’acheter. Dans la deuxième partie les lieux publics sont fermés, ceux que nous avons déjà rencontrés se retrouvent donc chez eux, peuvent juste se permettre d’errer un peu dans les rues et de s’approvisionner. Nous assistons à une nuit de pleine lune particulièrement spectaculaire. Tout cela fait écho, n’est-ce pas ? Sylvie Germain observe tout ce petit monde comme d’une fenêtre avec son humour, sa profonde humanité, son sens de la dérision. Elle parle de communication préservée ou empêchée, de tolérance ou d’intolérance, de vieillesse aimée ou subie, de liens conjugaux, parentaux, elle nous rappelle tout ce que ce confinement pouvait avoir d’inacceptable, des difficultés à échanger par écran interposé, de réflexions nouvelles sur soi et sur les autres suscitées par la solitude. On peut suivre ainsi, par exemple, un professeur de dessin qui, de son balcon à gauche encourage une petite fille à dessiner et à droite aide un ado dans son apprentissage de l’anglais. On voit une jeune étudiante abandonnée par son copain en coloc ailleurs, une très vieille dame et son aide arrivée à ce job après être passée par des réseaux de prostitution, une concierge qui va repêcher une dame qui ne bougeait plus de chez elle, deux « bâtards » d’un même père qui prennent une cuite ensemble, etc. C’est un peu toute la société actuelle mais pas dans ce qu’elle a de glorieux, de superficiel, de « normal » qui défile sous la plume de Sylvie Germain, plutôt dans ce qu’elle a de profondément vrai et humain. (présenté par Cécile)
Le roitelet / Jean-François Beauchemin
Un petit livre fait de chapitres très courts, pour relater la magnifique relation entre deux frères, l’un écrivain, l’autre schizophrène. Ils vivent dans le même village, et se retrouvent souvent le soir pour regarder le ciel, sentir le vent, s’émerveiller au potager… et simplement être ensemble. Avec tendresse et respect, l’écrivain protège son frère, érudit, un peu philosophe, mais incapable d’être heureux. Un récit plein d’amour, de silence, de poésie et de simplicité ! (présenté par Anne)
Le jour des corneilles / Jean-François beauchemin
Un Père et son Fils vivent reclus au fond des bois. Le Père est un colosse, taiseux, doué pour la chasse et la pêche, pour lire dans les étoiles, fabriquer des choses… mais violent dans ses accès de folie. Le Fils admire et adore son père , mais il cherche le sens de sa vie , et a besoin de savoir si son père l’aime. Le Fils raconte cette relation difficile au juge, donc on pressent dès le début une fin dramatique. Un roman d’amour, où l’horreur flirte avec la grâce. Une écriture magnifique et savoureuse, pcq l’auteur est québécois. (présenté par Anne)
Le Paradis Caché / Luca Di Fulvio
Le roman se déroule fin de l’Inquisition. C’est l’histoire de deux enfants confiés au Frère Thevet, Prieur d’un couvent. Susanna dont la mère, prostituée, meurt lors de l’accouchement et Daniele abandonné par son père suite au décès de sa mère. Ils sont élevés comme frère et sœur dans ce monastère. Le roman raconte en alternance l’enfance et la vie de jeunes adultes de Susanna et Daniele. Susanna est accusée de sorcellerie ,d’adultère et plus tard d’avoir assassiné son mari. Elle doit quitter le couvent et est emprisonnée. Susanna est-elle coupable ? Danielle sait qu’elle ne l’est pas. (présenté par Michèle)
La gosse / Nadia Daam
Il s’agit comme le dit l’auteure elle-même « d’un petit guide de survie pour les mères un peu foutraques et légèrement excentriques à l’armure d’acier et au cœur guimauve ! C’est un récit pudique et drôle sur le passage à l’adolescence des filles ! » Nadia Daam passe au crible épreuves, questions, doutes et moments tendres. La chronique d’une famille d’aujourd’hui, ou l’odyssée drôle et douce d’une mère tentant de comprendre cette étrange personne : sa fille adolescente qui a si vite grandi. Elle parle de relation mère – fille, de monoparentalité ou encore de transfuge de classe. Toujours avec autodérision et beaucoup d’humour. C’est plein de joies, de colères, d’amour. C’est plein d’argot, de verlan et ça cohabite très bien aussi avec un vocabulaire plus soutenu. Exemple : bédo (daube) et un coryphée (un chef). Nadia Daam est journaliste chroniqueuse sur Arte. Elle est féministe et élève seule sa fille. (présenté par Rosaria)
Renaître par les contes / Henri Gougaud
Henri Gougaud, mort le 6 mai 2024, a été important pour moi dans le domaine du conte car j’ai suivi ses ateliers durant quelques années. Conteur, romancier, chanteur et essayiste, Henri Gougaud n’a cessé d’explorer la richesse des contes. Dans cet ouvrage, il se confie sur son rapport à ces récits qui savent transformer les menaces en miracles et qui, tout au long de sa vie, lui ont offert des réponses essentielles. Car le conte a le pouvoir de déplacer les frontières qui semblent hermétiques, et de nous faire prendre conscience d’un seul coup de réalités qui résistent au raisonnement. Mêlant humour et sagesse, truffé d’histoires surprenantes et de rencontres étonnantes, ce livre illustre ce qu’est une vie nourrie par les contes. Une véritable invitation à se transformer sans cesse et à accueillir l’imprévu. Ici, une interview à La Grande Librairie, et un conte: L’homme qui voulait rendre les gens heureux.
Patricia / Geneviève Damas
Au Canada, Jean Iritimbi, un Centrafricain sans papiers, rencontre, dans l’hôtel où il travaille au noir, Patricia, une cliente blanche qui s’éprend de lui. Pour le ramener avec elle à Paris, elle vole le passeport d’un Afro-Américain. Mais Jean Iritimbi n’a pas dit à Patricia qu’il a une famille au pays, une femme et deux filles. Il apprend en les appelant qu’elles sont en route pour le rejoindre. Hélas, le bateau qui les transporte fait naufrage. On annonce peu de survivants. À partir d’une des tragédies de notre actualité, l’auteur a composé un roman bref d’une étonnante densité. C’est un texte à plusieurs voix, finement documenté et d’une grande émotion. Les trois personnages principaux parlent à tour de rôle, d’une voix juste, portée par une écriture orale et simple. Cette polyphonie offre une vision originale et sensible du drame des migrants. (présenté par Geneviève)
Bluebird / Geneviève Damas
Elle a 16 ans, vit chez sa Mamy et est enceinte. Que faire? Garder l’enfant, le confier, le donner à l’adoption… Magnifiques récits. (présenté par Geneviève)
Casa Rossa / Francesca Marciano
Voici l’histoire colorée et mouvementée d’une famille italienne qui évoque une période plus ou moins bien connue : la troublante histoire du fascisme, l’après guerre et surtout les années de plomb d’un pays livré au terrorisme dans les années 70, en passant par l’époque bénie de la dolce vita. L’autrice nous dresse le portrait d’une superbe bâtisse rouge : La Casa Rossa au cœur des oliveraies qui entourent Lecce, demeure acquise par le peintre Lorenzo en 1933, désormais à vendre et dont Alina Strada, la petite fille est chargée de superviser le déménagement. La découverte d’une vieille lettre lui permettra de rassembler les fragments d’un passé qui lui a toujours échappé. La rupture entre le peintre Lorenzo et son épouse Renée, l’effrayante solitude dans laquelle vécut leur fille Alba, le destin d’Isabella, la fille d’Alba, indomptable, fragile, passionnée, qui paiera le prix fort pour son intégrisme, Renée, mystérieuse et secrète, Alba, seule et incomprise, enfin, Alina qui tentera de se construire malgré ces mensonges, ces non-dits, ces violences et ces trahisons. C’est essentiellement une histoire de femmes attachantes, leurs choix, leurs doutes, leurs destins contrastés. L’histoire passionnante de trois générations qui se cherchent, faisant écho à l’histoire d’un pays forcé d’affronter ses contradictions, ses troubles, ses fureurs. Un beau roman lu facilement, une saga sans prétention à déguster à la lumière des Pouilles, si riche et si chaude. (présenté par Odette)
Rendez-vous à la bibliothèque lundi 10/06 de 14h à 15h30.
Vous êtes bienvenu(e)s même si vous n’avez pas de livre à présenter, à bientôt et bonnes lectures !
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